Le traitement hormonal de la ménopause (THM) est toujours un sujet de débat et de controverse parmi les femmes et les professionnel.le.s de la santé. Alors que certain.e.s considèrent le THM comme une option efficace pour atténuer les symptômes de la ménopause, d'autres soulignent les risques potentiels associés à cette thérapie. Dans cet article, nous explorerons ce qu'est le THM, les arguments pour et contre son utilisation, l'impact de l'étude Women's Health Initiative (WHI) sur la perception du traitement hormonal de la ménopause et les conclusions scientifiques les plus récentes.
Cet article a pour but de vous informer sur le THM et de vous aider à en parler sereinement avec votre praticien.ne, n'hésitez pas à déposer vos questions / remarques en commentaire !
_______
Ce que nous allons aborder dans cet article :
_______
Le traitement hormonal de la ménopause : QUID
Le THM vise à soulager les symptômes de la ménopause en remplaçant les hormones naturelles qui diminuent pendant cette période. L'administration d'œstrogène seul est généralement recommandée pour les femmes qui ont subi une hystérectomie (ablation de l'utérus). Cependant, chez celles ayant encore leur utérus, l'œstrogène est souvent combiné à de la progestérone pour prévenir le risque de cancer de l'utérus associé à l'utilisation d'œstrogène seul.
Les formes de THM :
Le THM est disponible sous différentes formes, notamment les comprimés oraux, les patchs cutanés, les gels, les crèmes et les anneaux vaginaux. La voie d'administration et le type de médicament prescrit dépendent des besoins individuels de la patiente, de sa tolérance aux médicaments et de ses préférences personnelles.
Les objectifs du THM :
Outre le soulagement des symptômes de la ménopause (notamment les bouffées de chaleur, troubles du sommeil, sautes d'humeur et sécheresse vaginale), le THM aide à prévenir la perte osseuse et réduire le risque de fractures associées à l'ostéoporose, ainsi qu'à prévenir l'atrophie vaginale.
Pourquoi tant de controverses autour du THM ?
Ou la fameuse étude du Women's Health Initiative (WHI) et ses conséquences
Les premiers essais cliniques sur le traitement hormonal de synthèse et ses effets postménopausiques ont vu le jour aux États-Unis à la fin des années 1990.
En 2002, une étude de grande envergure, la Women's Health Initiative (WHI), a profondément remis en question l'intérêt du Traitement Hormonal de la Ménopause (THM). Pour la première fois à cette échelle, le THM a été comparé à un placebo. Les résultats ont révélé que l'utilisation d'estrogènes conjugués équins (ECE) par voie orale, associée à un progestatif de synthèse, l'acétate de médroxyprogestérone (MPA), entraînait une augmentation significative du risque de cancer du sein, d'infarctus du myocarde, d'accidents vasculaires cérébraux et de thrombo-embolie veineuse. La diffusion médiatique de ces résultats a semé la panique et a incité les médecins à revoir leurs pratiques en matière de prescription de traitement hormonal.
Cependant, il est crucial de prendre en compte le contexte de cette étude. Les participantes étaient en grande majorité des femmes éloignées de la ménopause depuis plus de 10 ans, avec un âge moyen de 63 ans. De plus, les deux tiers étaient en surpoids, dont un tiers étaient obèses. Cette composition démographique pourrait expliquer en partie la prévalence plus élevée des événements cardiovasculaires chez les femmes traitées par rapport à celles ayant reçu le placebo. De plus, les doses d'hormones administrées étaient significatives compte tenu de cet âge avancé.
Au fil des années, une réévaluation de l'étude WHI a été entreprise et de nouvelles études ont montré que l'utilisation du THM chez les femmes plus jeunes ou celles ayant connu une ménopause précoce avait un effet bénéfique sur le système cardiovasculaire, réduisant les maladies coronariennes et la mortalité toutes causes confondues.
Malgré ces avancées scientifiques, l'opinion publique sur le THM (ainsi que le corps médical qui ne porte pas suffisamment de considération ou manque d'information concernant cette période de la vie des femmes) reste largement inchangée, ce qui entraîne d'importantes conséquences négatives sur la santé et la qualité de vie des femmes. La stigmatisation persistante autour du THM dissuade souvent les femmes de recourir à un traitement qui pourrait pourtant leur être bénéfique, créant ainsi un dilemme complexe pour les patientes et les professionnels de la santé.
Les arguments pour la prise du THM
La prise de Traitement Hormonal de la Ménopause présente plusieurs avantages :
le THM est efficace pour soulager les symptômes fréquents de la ménopause, tels que les bouffées de chaleur, les sueurs nocturnes, les troubles du sommeil et la sécheresse vaginale
Il peut contribuer à prévenir l'ostéoporose en maintenant la densité osseuse et en réduisant le risque de fractures, ce qui est particulièrement important pour les femmes ménopausées, car elles sont plus sujettes à la perte osseuse.
Des études ont également suggéré que le THM peut avoir des effets positifs sur la santé cardiovasculaire, en réduisant le risque de maladies coronariennes et en améliorant les profils lipidiques chez certaines femmes.
Enfin, le THM peut aider à soulager les symptômes psychologiques associés à la ménopause, tels que la dépression, l'anxiété et les fluctuations de l'humeur,
Les risques associés à la prise du THM
J'ai repris les données du GEMVI (Le Groupe d’Etude de la Ménopause et du Vieillissement hormonal) concernant les connaissances des risques à dates (données datant de 2020) :
Risque concernant les cancers hormonaux dépendants : :
Concernant le cancer du sein : le THM ne crée pas de cancer du sein mais peut stimuler un cancer microscopique. Le risque représente :
-2 cas supplémentaires pour 1000 femmes prenant un THM pendant 5 ans,
-6 cas pour 1000 femmes prenant un THM pendant 10 ans
-12 cas pour 1000 femmes traitées pendant 15 ans
En sachant que le risque hors THM, pour une femme entre 50 et 60 ans est de l’ordre de 50 cas pour 1000 femmes. Ce risque se normalise 2 à 5 ans après l’arrêt du traitement.
Concernant le cancer de l'utérus : "Les œstrogènes, lorsqu’ils sont donnés seuls, augmentent le risque de cancer de l’endomètre. L’adjonction d’un progestatif doit donc être systématique, au minimum 12 jours par mois. Il peut être conseillé une échographie de surveillance de l’endomètre après 5 ans de THM. Chez la femme hystérectomisée, l’addition d’un progestatif n’est pas nécessaire."
Concernant le cancer de l'ovaire : "Une analyse 2015 montre une augmentation du risque de cancer de l’ovaire associé au THM. Le sur-risque est évalué à 1 cas supplémentaire pour 10 000 femmes par année de THM. Il n’a pas été observé dans l’étude WHI pour 5 ans de traitement. Il faut consulter en cas de troubles digestifs nouveaux, d’aggravation d’une constipation ou de douleurs pelviennes, que ce soit avec ou sans THM."
Risque de maladies cardiovasculaires
Certaines formes de THM, en particulier lorsqu'elles sont administrées par voie orale, peuvent augmenter légèrement le risque de maladies cardiovasculaires. Le risque est néanmoins indiqué comme étant très faible par le GEMVI.
Risque de thrombo-embolie veineuse
Le risque (phlébite profonde, embolie pulmonaire) est augmenté d'un facteur 2 à 3 par les estrogènes par voie orale, surtout pendant la 1ère année de traitement. Ce risque n’est pas présent lorsque les estrogènes sont donnés par voie cutanée et en association avec la progestérone ou des dérivés proches.
Les données scientifiques à date (durée de la prise, ratio bénéfice VS risque)
Le THM, à partir de quand ?
Le traitement est recommandé à partir du moment où la ménopause est diagnostiquée formellement (à savoir : au bout d'une année complète sans règles après 45 ans). Si vos symptômes en périménopause sont trop importants, des progestatifs ou la pilule oestroprogestative peuvent vous être délivrés. Votre médecin minimise votre souffrance ? N'hésitez pas à faire entendre votre voix, et/ou à changer. Ce n'est pas parce que la ménopause est un processus naturel qu'il doit être vécu dans la douleur !
Le THM, pendant combien de temps ?
En théorie, il n'existe pas de durée maximale définie pour la prise d'un Traitement Hormonal de la Ménopause (THM). Conformément aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS), le THM doit être prescrit aussi longtemps que persistent les symptômes, avec une adaptation de la dose minimale efficace pouvant varier dans le temps. Il est recommandé de procéder à une réévaluation annuelle de la balance bénéfice/risque après 5 ans de traitement.
Quelles femmes n'y ont pas droit ?
Toutes les femmes ne peuvent pas prendre de THM en raison de divers facteurs de risque et de conditions médicales préexistantes : antécédents de cancer du sein et/ou de l'endomètre, l'hypertension artérielle non contrôlée, diabète, obésité, hypercholestérolémie, thrombose veineuse profonde, embolie pulmonaire ou autres troubles de la coagulation sanguine, maladies hépatiques. N'hésitez pas à prendre plusieurs avis sur le sujet, les recommandations scientifiques évoluent, de nouveaux traitements arrivent aussi sur le marché, etc. Petit à petit : ça bouge en fin dans le bon sens pour la santé des femmes !
En conclusion
Il est important de noter que le risque associé au THM varie d'une femme à l'autre en fonction de facteurs tels que l'âge, les antécédents médicaux personnels et familiaux, le type de THM utilisé et la durée du traitement. Dans de nombreux cas, les avantages potentiels du THM, tels que le soulagement des symptômes de la ménopause et la prévention de l'ostéoporose, peuvent l'emporter sur les risques potentiels, mais cette décision doit être prise individuellement en tenant compte de ces facteurs. Une discussion ouverte et approfondie avec un.e professionnel.le de la santé est essentielle pour évaluer les risques et les avantages.
Vous avez des questions ? RDV en commentaires.
Comments